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Voeux 2013, la sacralisation de l'optatif

Mon allergie à cette coutume ne fait que s'aggraver d'année en année. Je ne veux pas, certes, commencer l'année en schtroumpf râleur à casser l'ambiance, mais enfin on peut s'interroger sur la sacralisation républicaine de cette coutume. Il semble que le Président de la République s'interroge lui-même et tente de balayer "une sorte" de doute :

"A mon tour, je m’adresse à vous, ainsi qu’à votre gouvernement, pour vous présenter mes vœux les plus chaleureux pour l’année qui commence.Nous respectons là un usage. Une sorte de civilité républicaine. Nous partageons aussi un moment de cordialité. J’y attache du prix."*

Certes c'est un moyen agréable, cordial donc, de renouer avec des amis et connaissances éloignés, mais aujourd'hui les réseaux sociaux en donnent heureusement l'opportunité régulière sans cèder au rituel forcé de l'annualité... Ce qui m'agaçe c'est le caractère officiel, solennel, compassé, que prennent les cérémonies de voeux dans les collectivités, les entreprises et au plus haut sommet de l'Etat... Pendant tout le mois de janvier on va voir notre monarque républicain fêter chaque communauté en lui apportant son lot de flatteries et de souhaits sucrés... Cet exercice me paraît au XXIe siècle  aussi vain qu'inutile... Les voeux, cela devrait durer trois jours, en un milliard de SMS et MMS, et puis on passerait aux choses sérieuses, aborder les problèmes de front et tenter de les résoudre. 

La politique française a réinventé un mode grammatical que notre langue n'a pas retenu du grec, l'optatif. Ce n'est pas récent, mais d'année en année avec la dureté des temps la lumière diffusée en janvier est de plus en plus intense, sûrement pour dissiper les démons. On devrait rééssayer la bave de crapaud mélangée au clair de lune avec une bonne 1664...

L'optatif c'est le mode du souhait et du désir. Pas celui de l'action. On s'en remet donc à des forces externes pour tenter de conjurer le mauvais sort. Plût aux dieux que la croissance revienne, que le chomâge régresse "coûte que coûte", que la pauvreté recule, que le déficit s'efface, que la solidarité vienne, que les impôts soient librement acceptés. Le plus curieux, voire baroque, des voeux du Président de la République est "la préparation de l'avenir"... Que peut-on souhaiter en le matière, sinon l'essence même de l'action des pouvoirs publics ?? 

Et ceci se termine par cette belle démonstration : "Une année dense nous attend. J’ai la conviction que la politique de votre gouvernement portera ses fruits. Il y faudra de la patience. Mais j’ai confiance."*

Allez ! J'arrête de maugréer, je vous souhaite de bosser fort, de bien dormir, d'éviter les méidements inutiles, de ne pas croire à tout ce qu'on vous raconte, d'échapper aux maladies et aux calamités naturelles, d'éviter le chômage et le surendettement, de cesser de fumer (ça peut aider...), de regarder en traversant la rue, de ne pas dépasser les limitations de vitesse. Essayez de devenir "anti-fragiles" ** car de toute façon le futur n'existant pas, il n'est que probabilité... L'année aura 365 jours, ça c'est à peu près acquis. J'ai confiance. Soyez patients pour attendre mon billet d'humeur de janvier 2014...

* http://www.elysee.fr/declarations/article/v-ux-du-president-de-la-republique-au-gouvernement/

** Sur l'antifragilité, je parlerai ici abondamment du dernier livre de Nassim Nicholas Taleb, "Antifragile"

Commentaires

Rouget

« Ce qui m'agaçe c'est le caractère officiel, solennel, compassé, que prennent les cérémonies de voeux dans les collectivités, les entreprises et au plus haut sommet de l'Etat »

La désacralisation vous l'avez eu, elle s'appelait Nicolas Sarkozy.

Vive le monarque républicain, dans l'esprit de la Vème République.

jean-Pierre Corniou

Désacraliser la fonction présidentielle, ce n'est pas s'agiter dans tous les sens, c'est traiter les sujets avec méthode, rigueur et sérieux sans céder aux démons de la communication... Il "suffit" de faire les choses utiles pour organiser le débat et éviter à la fois le mythe de l'homme providentiel, ni le creux de l'homme normal... Je reconnais que la tâche n'est pas facile, mais je suis résolument hostile aux fastes et aux postures monarchiques dans une démocratie qui doit s'assumer et s'appuyer sur tous les niveaux pour dégager et mettre en oeuvre les solutions dont nous avons besoin.

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