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Innovation et enseignement

Vraiment une bonne nouvelle cette co-production entre le site pédagogique militant Le Café pédagogique et le Ministère de l'éducation nationale : le 4e Forum des enseignants innovants démontre que l'innovation dans l'enseignement est un fait réel, puissant, motivant aussi bien pour les élèves que pour les enseignants. Les technologies de l'information doivent résoudre les problèmes de la société. S'il est un domaine où elles doivent stimuler, réveiller, séduire, construire, c'est bien l'éducation.

Peu de choses ont changé dans l'éducation : un maître, une salle de classe, un tableau, des prises de notes sur des cahiers, des manuels, certes aujourd'hui avec de belles photos couleur... Et dans la vie : tout a changé depuis les années soixante-dix. Il suffit de regarder ce que font les gens dans un TGV : tous les passagers ont un écran. Tous ? Sauf un professeur qui corrige un paquet de copies...

On se plaint des coûts de l'enseignement, du manque d'enseignants, des résultats médiocres, de la violence scolaire... Mais qui parle de l'ennui de jeunes face à un modèle totalement décalé où on explique qu'il ne faut surtout pas aller sur Wikipédia à cause des "erreurs" ? Certes il y a eu des efforts, quelques PC, des tableaux blancs interactifs, des iPad  en Corrèze...). Mais il faut surtout des programmes pour apprendre autrement. Et seuls les enseignants peuvent les écrire. C'est pourquoi cette rencontre des enseignants innovants est si importante.  


Ville, numérique et mobilités : quelle synthèse ?

La ville a dès l’origine été le vecteur de la civilisation. Lieu de rencontre, elle a porté la culture contre la barbarie, le savoir contre l’ignorance, le progrès contre le conservatisme, la démocratie contre le totalitarisme. La ville est lieu de lumière, la campagne, d’obscurité. Urbain et policé, le citoyen moderne est donc étymologiquement le fruit de la ville. De cette attractivité universelle de la ville est né le monde moderne, incarné dans les lieux de culte, de culture, de pouvoir et de commerce. Flèches de cathédrales, minarets ou beffrois, gratte-ciels ou autoroutes, laïcs ou religieux, la ville marque le paysage de ses symboles. Rappelons que les grandes innovations qui ont marqué l’essor des villes au XIXe siècle ont été l’eau courante et les égouts, pour lutter contre l’insalubrité des centres villes, mais aussi les trottoirs qui ont autorisé le déplacement sûr des piétons et l’apparition du commerce de proximité, au moins aussi ludique qu’utilitaire, de l’éclairage à gaz, puis électrique, ainsi que l’essor des moyens mécanisés de transport qui ont chassé la traction hippomobile… et ses déjections nocives.

Mais la ville avec la révolution industrielle a éclaté hors de ce schéma d’abord qui autour des manufactures et des haut-fourneaux a  constitué la « cité industrielle », rassemblement d’habitations ouvrières autour de la mine, du haut-fourneau, dont les corons ont été le symbole. Puis l’automobile a rendu possible l’extension de la ville hors de ses enceintes historiques. Les cités périphériques sont nées de l’automobile et de l’hypermarché. La ville, dans son dédale de rue piétonnière, a souffert face à l’irruption arrogante de l’automobile. Il fallait, disait-on, « adapter » la ville à l’automobile, percer des voies nouvelles, développer les stationnements.

Shanghai 355
 

Dans les années soixante dix, la ville a été soumise au bistouri des planificateurs qui ont tailladé, partout dans le monde, dans ses vieilles chairs archaïques  greffant sur les cœurs historiques ces artères modernes que sont les autoroutes urbaines. Mais la baron Haussmann n’a rien fait d’autre.

Chaque époque, chaque étape, est le fruit de la rencontre entre une vision du progrès, alimenté par la pensée technique, et une projection de la société qui s’incarne dans des structures de pierre, de verre et d’acier. La ville se lit à travers ses couches socio-techniques, aucune de disparaissant vraiment. C’est un organe vivant qui porte symboliquement tous les stigmates des errements de  la pensée humaine, couche après couche.

Le XXIe siècle sera urbain

Le XXIe siècle sera urbain pour des raisons démographiques et parce que l’attractivité de la ville l’emporte partout sur ses limites. 300 millions de Chinois vont rallier  les villes dans les vingt prochaines années. D’où l’urgence du thème de l’Expo de Shanghai 2010 « Better city, better life » qui claque comme un slogan impératif. La ville va donc, comme d’habitude, à nouveau connaitre une vague de transformations. Et s’adapter à une nouvelle dimension du paradigme socio-technique, le numérique. Comment se préparer à cette évolution et ne pas laisser le marché, seul, décider?

La ville remplit trois fonctions syncrétiques : échanger, produire, exercer le pouvoir. Pour cela il faut des hommes, donc les héberger, les nourrir, les distraire. Et depuis toujours, on cherche par commodité à rassembler ces fonctions pour en permettre un accès facile en temps et en effort, donc en argent. La ville a toujours été conçue comme lieu efficace. L’idéal est de faire tout ceci au même endroit, réussite de l’échoppe de l’artisan médiéval. Or le « progrès » s’est traduit par une optimisation technique qui a conduit, étape après étape, à dissocier ces trois fonctions. On a progressivement séparé le lieu d’habitat du lieu de production et d’échange, en spécialisant  au sein de la même entité urbaine les quartiers, zones résidentielles, zones marchandes, zones de production. Cette répartition des temps de vie a été facilitée par la révolution technique des transports qui a permis de spécialiser les lieux sans augmenter le coût de transaction, les personnes passant d’un point à un autre en fonction de leurs besoins. Ainsi si le temps de transport est constant, la distance parcourue a explosé depuis le milieu du XXe siècle. Mais le principal déterminant est le facteur démographique. Sous la poussée de l’accroissement  de la population urbaine, la pression foncière, après une première étape de verticalisation des activités, a chassé des centres vers les périphéries les activités les moins génératrices de revenus et entrainé les populations les moins riches à s’éloigner des centres. Cette dispersion des activités  a eu comme conséquence l’augmentation de la demande de transport, absorbée dans une première phase par l’automobile, puis, face aux phénomènes de congestion, par le renouveau des transports urbains collectifs. Néanmoins, l’éclatement fonctionnel intra-urbain génère un mouvement brownien des personnes et des biens dont le coût en temps, en énergie, en investissement individuels comme publics est perçu comme insupportable. Plus d’infrastructures entraîne plus de mouvements, dans une course infinie…

Aussi, comment penser la ville du XXIe siècle ? Cette question lancinante se retrouve dans toutes les réflexions politiques. Deux visions apparemment contradictoires commencent à émerger. La première vise à corriger les déviations du modèle originel des cinquante dernières années en réenchantant la ville pour en faire un lieu de vie, de travail et de loisir avenant et efficace. Ceci implique un mouvement de reconcentration urbaine, dépouillée des dommages collatéraux grâce aux  « technologies vertes ». La seconde option s’appuie sur une vision issue des technologies de l’information : si la ville est le fruit de l’information, comment exploiter la puissance des technologies de l’information  pour développer les échanges féconds en rassemblant l’information sans les hommes qui l’incarnent ?  Au fond, ces deux tendances ont le même objectif : la puissance des réseaux, qu’ils soient physiques ou numériques, revisités par les technologies, doit permettre de réconcilier qualité et intensité des échanges en éliminant les contraintes, notamment le gaspillage énergétique engendré par les transports.

Le renouveau de la ville

La ville aujourd’hui recherche partout dans le monde à retrouver une légitimité en accueillant à nouveau ses fonctions historiques  dans un nouvel environnement répondant aux aspirations des populations : sécurité, calme, absence de pollution, lumière. On veut finalement construire la campagne en ville. Là où la voiture avait permis aux urbains modernes d’échapper aux centres villes bruyants et irrespirables, on veut désormais chasser la voiture, au moins celle à moteur thermique, pour retrouver une qualité de vie urbaine dont la voiture, les camions  sont devenus l’antithèse et faire revenir habiter dans les centres les enfants de ceux qui les ont déserté.

 Ce défi répond à plusieurs exigences du XXIe siècle. Nous avons besoin de retrouver une forme nouvelle d’efficacité énergétique et seule la concentration des  fonctions permet d’y parvenir. Nous avons besoin de fabriquer du temps pour exploiter l’immense potentiel des technologies de l’information et donc la réduction du temps de transport est une mine considérable. Nous avons besoin de consommer plus intelligemment en s’orientant vers les services difficilement accessibles dans un environnement dilué que ce soit la santé, la culture, les loisirs. Nous avons besoin de nous prémunir contre toutes les formes de ghettos en diversifiant au mieux les populations dans une mixité acceptable et féconde, notamment sur le brûlant dossier scolaire. Là où la ville avait échoué en éclatant, existe-t-il aujourd’hui une chance de retrouver une nouvelle harmonie économique et sociale en se reconcentrant avec intelligence.

Ce message ne manque pas toutefois pas de paradoxes quand on constate les ravages actuels de la pression du prix du foncier  dans des villes comme Paris, où même  le bureau de poste des Champs-Elysées a du fermer ses portes. Pour lutter contre la pression foncière, pour rendre l’accès au logement  mais aussi à l’activité compatible avec les budgets, il faut reconquérir des espaces urbains pour densifier  et relancer l’urbanisme vertical qui avait lui aussi échoué. La densification n’est pas populaire quand chacun rêve de maison individuelle et de jardin…

Mais en même temps la « rurbanisation » expose ses bénéficiaires à de rudes conséquences, les obligeant à renoncer à un meilleur niveau de services mais surtout à consentir des investissements coûteux en temps et en moyens individuels de transport.

Données partagées 

La synthèse peut venir des technologies de l’information. Elles sont désormais omniprésentes dans les fonctions qui ont fait  de la ville ce lieu de vie collective féconde : les transports, le travail, le commerce, l’information, l’échange intellectuel, la pratique de la démocratie. Elles ne substituent pas à la puissance du contact physique qui reste indispensable tant que l’émotion sera alimentée par tous nos sens. Mais elles le complètent et l’amplifient. Elles peuvent également s’y substituer temporairement. Se noue entre les technologies et les pratiques sociales une alchimie nouvelle qui n’est pas une alternative mais une inclusion. Facebook conduit aux apéritifs Facebook mais aussi aux rassemblements de la place Tahrir au Caire ou à la Puerta del Sol à Madrid.

La ville fabrique également des données. Elle concentre une masse d'information considérable qui  dort dans les archives de ses différente parties prenantes. L'information démographique est la clef. Y sont associés des données sur les transports, le niveau de vie, la consommation, la santé qui permettent de construire une cartographie dynamique des besoins, mais aussi des offres. Il faut cesser de considérer que l'information est propriétaire, descendante  et confidentielle. Elle doit être collective, poly-centrique, ouverte, dans un cadre qui bien entendu protège les données individuelles. Cette information est une matière première précieuse pour décider, arbitrer, proposer, créer une richesse collective qui est portée par des entrepreneurs privés, ou publics...C'est le puissant mouvement de "l'open data", ou "données ouvertes", que plusieurs villes françaises ont exploré dont Rennes et plus récemment Paris mais qui n'ets encore qu'à ses balbutiements. 

Dans le monde du travail, le moyen naturel de « travailler » est bien d’échanger avec la messagerie électronique. C’est le premier système d’information des entreprises. Or il n’y a nul besoin  de faire deux heures de transport par jour pour échanger à travers la messagerie ou un espace collaboratif avec son collègue de travail, qui peut être à 10 mètres sur le même plateau, ou à 6000 km. Le travail est un processus collaboratif qui rassemble des compétences dispersées à travers l’entreprise étendue. Concentrer une fraction de ces compétences dans le même espace est à la fois coûteux pour l’entreprise, pour les collaborateurs et pour la collectivité qui doit dimensionner, sans jamais y parvenir,  les infrastructures pour la fameuse « heure de pointe ». En même temps, le travail ne peut être désincarné. On appartient à une équipe, on se reconnaît dans une entreprise, on partage à la cantine l’information informelle encore difficile à faire transiter par les canaux officiels. Il faut donc trouver un équilibre entre le travail nomade, mobile et les rencontres. Beaucoup d’entreprises y parviennent. Et les collectivités y trouvent leur compte.

De même le commerce électronique permet de faire ses courses sans quitter son salon, ce qui épargne les coûts et désagréments des courses du samedi. Mais le commerce « physique » est aussi un lieu d’échanges, de rencontres, d’information. Dans ce domaine aussi ,les  individus effectuent des arbitrages que l’offre collective peut faciliter. D’où à la fois l’essor du e-commerce et le renouveau des centres villes piétonniers et commerciaux, comme des centres commerciaux repensés.

L'ambition urbaine, multi-modale, multidisciplinaire

La ville moderne doit être ambitieuse. Créer les conditions d’un environnement moins traumatique qu’au XXe siècle par des technologies non agressives  (transports électriques silencieux, pistes cyclables en site propre,  collecte automatique des déchets, logistique douce, potagers urbains, toits verts…) et en même temps offrir une large place aux technologies de l’information par une offre stimulante (haut débit fixe et mobile, informations intelligentes sur les transports et la vie citadine, espaces collectifs de travail multi-entreprises sur le modèle des boot camps initiés en France par La cantine).

C’est un modèle émergent sur lequel travaillent un grand nombre de villes dans le monde, aussi bien dans les pays matures que dans les pays émergents qui ne souhaitent reconduire le même modèle urbain. C’est un formidable chantier systémique, multidisciplinaire, qui implique beaucoup d’humilité de chacun des acteurs car chaque discipline impliquée doit se réinventer en fonction de ce que les autres sont en mesure de proposer. Force est de reconnaitre que la France qui peut s'enorgueillir d'un capital urbain de premier plan, ne place pas ses grandes villes dans les palmarès des meilleures villes du monde... Ce qui prouve qu'il y a encore beaucoup de travail à faire pour intégrer ces différentes vues dans une approche globale, cohérente...

 


La gouvernance des systèmes d'information, levier de l'innovation

L’évolution du rôle du système d'information  implique la maîtrise d’une vision à 360°  des évolutions de l’organisation et de son environnement. Dans les entreprises et organisations marquées par une forte transformation de leur métier,  de leur environnement réglementaire, des exigences des clients,  la traduction en systèmes opérationnels de ces pressions constantes nécessite une capacité d'exécution sans faille dans des contextes budgétaires tendus. Les DSI ont réussi depuis dix ans à hisser l'efficacité opérationnelle au meilleur niveau et à monitorer de façon transparente leurs performances. Mais il faut aussi être capable d’anticipation et de veille pour ne pas se laisser surprendre par les évolutions du contexte.  La gestion des risques est un élément clef de la planification stratégique de la DSI. Elle doit permettre de consolider l’itinéraire  de déploiement de nouvelles solutions, de la vision amont à la mise en œuvre opératoire par chaque collaborateur.

Bien évidemment, c'est un exercice difficile qui demande une vigilance constante puisque la qualité opértionnelle d'aujourd'hui ne garantit en rien la performance future. Or les DSI au cours de ces années de crise ont été confrontées à des exigences souvent violentes de réduction de coût, accompagnées d'une marche souvent forcée vers les restructurations, l'externalisation et l'offshoring, perçus non pas comme des outils à exploiter rationnellement, mais comme des leviers imposés pour forcer les transformations.

Alors que les poussées technologiques ne se ralentissent pas, avec l'irruption des smartphones et tablettes, les "apps" et l'informatique en nuage, les réseaux sociaux, plébisicités par les utilisateurs et les directions métiers, la DSI ne peut se contenter de gérer un repli vers des fonctions purement opérationnelles. Elle doit reprendre l'initiative au coeur de l'entreprise en exercant avec compétence sa mission historique de garantie de l'alignement du SI avec les métiers. Ce n'est que par une gestion dynamique de l'innovation qu'elle peut y parvenir. La  DSI numérique de ce début de XXIe siècle doit être en mesure d'assurer le leadership de l'innovation  en rendant le rêve technologique accessible, fiable et en toute sécurité.

La gouvernance des systèmes d’information rassemble aujourd’hui les méthodes et outils pour y parvenir. La maturité de Cobit et ValIT permet à la DSI d’étayer sa démarche sur des référentiels solides et construits sans réinventer les processus critiques. L’auditabilité interne et externe des  référentiels renforce la crédibilité des démarches de la DSI. Les outils existent. Les meilleures pratiques sont codifiées. L’observation de ces règles et pratiques est une garantie de la pertinence des choix et de l’alignement des ressources informationnelles en fonction des attentes des organisations.

Dans des enveloppes budgétaires limitées, et avec des échéances qui imposent une grande réactivité,  choisir est plus que jamais renoncer. Investir dans les systèmes d’information doit répondre à des objectifs prédictibles et mesurables en réduisant la part d’incertitude.

Le déploiement d’une stratégie de gouvernance des systèmes d’information n’est pas un exercice conceptuel : c’est un outil de décision qui doit permettre de résoudre des problèmes visibles. Des performances opérationnelles jugées médiocres, des coûts opaques, des projets qui n’en finissent pas, des prestataires inefficaces, des montées de version qui se passent mal, sont autant de symptômes. La gouvernance répond à une demande de clarification des relations entre acteurs et de transparence des décisions.

Le processus de gouvernance doit constamment veiller à ce que «les méthodes et procédures, disciplinées et pro-actives, sont mises en œuvre pour garantir que les niveaux de service appropriés sont fournis à tous les utilisateurs des technologies de l’information en phase avec les priorités métiers et à un coût acceptable » (Foundations of Service Level Management, CobiT).

Loin d'une vision théorique du système d'information, le processus de gouvernance doit permettre de construire et diffuser largement les réponses aux questions clefs de la performance du système d'nformation.

Les questions suivantes doivent être portées à l'ordre du jour des structures en charge de la gouvernance et les réponses apportées par l'organisation doivent faire l'objet d'une élaboration collective, publique, datée, chiffrée et auditable.

  1. Déclinaison d’une vision globale d’alignement stratégique à travers les référentiels d’entreprise et l’urbanisation, validée par les directions métiers. Le SI doit répondre aux questions clefs de la stratégie, le modèle de Porter étant un bon outil pour resserer les questions sur des thèmes vitaux pour l'entreprise.
  2. Choix explicite des niveaux d’intervention des acteurs du marché (make or buy piloté). Il faut identifier les sujets où l’externalisation n’est pas convaincante, n’a pas livré les gains escomptés ou l’amélioration visée de la qualité de service et mettre en œuvre de plans de redressement.
  3. Processus de maîtrise de la demande de systèmes tant en travaux neufs qu’en maintenance : comment gérer de façon proactive  les demandes de changement de système qui n’ont pas d’impact rapide ? ou qui impactent des systèmes dont l’espérance de vie est limitée ?
  4. Implication du management opérationnel de l’entreprise dans les décisions de lancement et de déploiement de nouveaux systèmes : mettre en évidence les domaines SI pour lesquels l’entreprise subit des décalages par rapport à la concurrence, benchmarker les meilleures pratiques
  5. Financement solidaire entre fonctions de la réduction de la complexité applicative et technique : lutter efficacement contre l’obésité informationnelle pour baisser les coûts de stockage, de réseau, de logiciels périphériques, de licences en surnombre
  6. Choix des outils pertinents de pilotage intégrés dans le système de contrôle de gestion : travailler avec le contrôle de gestion pour intégrer les paramètres SI dans le reporting
  7. Association étroite des utilisateurs et directions métiers à la construction d'une vision innovante qui doit intégrer "sans couture" l'innovation technique dans les pratiques sociales
  8. Prise de position sans équivoque sur les sujets liés à l'économie du web : réseaux sociaux, accès au web, "webification" des applications, e-commerce, e-reputation...

Les thèmes de réflexion et d'action ne manquent pas. On peut regretter que trop souvent poussée par la seule dimension audit, la gouvernance ait pu apparaître comme une surcouche de contrôle coûteuse, rigide, bureaucratique. Beaucoup de DSI hésitent devant la portée de l'investissement, difficile à justifier en période de disette budgétaire.  Il n'en est rien si on en fait une application pertinente pour répondre aux questions posées par les directions générales et les utilisateurs sur la pertinence des invetsissements Si et sur leur qualité perçue au quotidien. Une application raisonnée et professionnelle des référentiels de gouvernance apporte transparence et dynamique au pilotage des systèmes d'information. Ne pas y recourir est s'infliger un handicap.

 


Pourquoi la mobilité fait voler en éclats les codes habituels du travail ?

J'étais invité à m'exprimer à nouveau sur le site partenaire du monde.fr sur les transformations du monde du travil induites par les technologies de l'information. Ces lignes y ont été publiées le 16 mai. Le débat est ouvert. Nous sommes clairement dans une "faille spatio-temporelle" entre ce que nous pouvons faire avec les nouveaux outils de la mobilité et l'(in?)intelligence des organisations encore pétries par les modèles antérieurs. C'est une situation normale dans cette phase de grande transformation où l'on constate que la notion classique d'emploi, forgée depuis la révolution industrielle, codifiée et stabilisée par le "welfare state" est en pleine mutation à l'ère, naissante, du crowd-sourcing...  Pour le meilleur, parfois, mais souvent pour le pire... C'est pourquoi nous avons tous de la peine à raisonner dans ce monde nouveau avec les mêmes outils qu'hier. Le risque est que le cynisme conduise à exploiter encore plus la personne dans ses activités contributives puisque les barrières classiques du temps et de l'espace sont aujourd'hui enfoncées. Inventer de nouveaux modèles, un nouveau vocabulaire (qu'est ce que le "télé-travail"  dans un monde où chacun "travaille" là où il est, dans le TGV, le métro, la salle d'attente, son salon ?), de nouvelles régles juridiques est bien le défi d'aujourd'hui. On pressent que le passage de la main-d'oeuvre au "cerveau-d'oeuvre" n'est pas un exercice innocent. Il est grand temps de travailler politiquement et socialement sur ce nouvel environnement sans laisser la seule technologie dicter son rythme.

Je vous invite  à visiter ce site qui collecte des contributions stimulantes.

http://www.planete-plus-intelligente.lemonde.fr/organisations/pourquoi-la-mobilite-fait-voler-en-eclats-les-codes-habituels-du-travail_a-12-695.html

lundi 16 mai 2011 14:39

Les communications numériques omniprésentes bouleversent l'équilibre des relations au travail. Nous sommes entrés dans l'ère des rendements linéaires : plus on produit, plus il y a à produire. Tablettes et smartphones sont les outils de cette insatiable activité.

 
Crédit : Fotolia

Il n'y a pas si longtemps, à travers l'agriculture et l'artisanat, vie professionnelle et vie sociale étaient inextricablement liées, le temps et l'espace de vie et de travail se confondant. C'est la manufacture qui a « inventé » le temps de travail, c'est l'usine qui a conduit à réglementer la durée du travail et inventé les congés payés, innovations qui ont moins d'un siècle. Est-ce que le smartphone et la tablette vont remettre en cause ce modèle de dissociation de la vie au travail et de la vie privée ? Tout se passe en effet comme si les symboles de la modernité communicante, du triomphe du numérique dans notre société du savoir devenaient de redoutables vecteurs de radicalisation de la relation au travail.  
 
Même si le smartphone s'est vraiment démocratisé en 2007 avec l'iPhone (rappelons toutefois que le Blackberry a été lancé dès 2001), et la tablette en 2010, ces deux objets sont vite passés de la logique statutaire qu'en confère la possession par les cadres dirigeants, à une logique utilitaire répandue dans tous les niveaux de la société et tous les cas d'usage.  
 
POUR LES SALARIES, LA LUMIERE NE S'EST JAMAIS ETEINTE
 
A travers ces outils, ce début de XXIe siècle remet en cause les deux paramètres réglant le travail : que produit-on ? quel temps faut-il pour le produire ? Dans le monde classique de la production matérielle, le taylorisme industriel avait donné un cadre précis à cette question en développant une dynamique puissante de recherche de productivité du travail : augmenter le volume des unités produites par unité de temps. Une des réponses a été la mécanisation, puis l'automatisation des tâches en confiant aux machines le soin d'exécuter sans défaillance les gestes les plus répétitifs. L'informatisation a emprunté un chemin identique en identifiant des tâches élémentaires exécutées à l'aide de programmes permettant d'accroître la productivité de façon mesurable.  
 
L'ère du numérique dans laquelle nous sommes entrés depuis les débuts du web - il y a maintenant plus de quinze ans - bouleverse ce modèle de production. Donc les mesures de productivité. Nous sommes entrés dans une logique de rendements linéaires. Plus on produit, plus il y a à produire. Les tâches ne sont jamais épuisées. Pour les métiers modernes de l'entreprise (conception, coordination, commercialisation, communication), la lumière ne s'éteint jamais... La mondialisation numérique s'affranchit des fuseaux horaires et des distances, du jour et de la nuit. L'immensité du potentiel du web conduit à n'en jamais toucher les limites. Nous sommes entrés dans un monde infini de « manipulations de symboles » selon la formule du chercheur et homme politique américain Robert Reich.  
 
QUAND ETRE DEBORDE DEVIENT LE QUOTIDIEN
 
Il est évident que le cadre formel du travail tel que défini par la loi vole en éclat dans les métiers qui gèrent de l'information numérique. Pourquoi s'arrêter de produire quand on a quitté formellement l'enceinte de l'entreprise car clients, fournisseurs et collaborateurs continuent à exister au-delà. Avec tablettes et smartphones, cette insatiable activité a trouvé son outil de production. Toujours présent, toujours connecté, toujours joignable, toujours réactif, le collaborateur du XXIe siècle ne mesure pas son temps, infiniment dilatable en dehors des limites physiques du lieu et du temps de travail.  
 
Comme la production est volatile, le temps qui y est consacré tend vers l'infini. Etre débordé n'est plus le signe d'un manque d'organisation, mais le statut normal du manipulateur de symboles. Néanmoins cette situation, si elle peut susciter une addiction euphorique chez certains, n'est que la forme adulte de l'addiction aux jeux et à Facebook que dénoncent ces mêmes adultes chez leurs enfants. Rien ne ressemble plus à une bande d'ados pianoteurs qu'un comité de direction dont chaque membre est retranché derrière son BlackBerry, plus ou moins ostensiblement selon le grade.  

LE MANAGEMENT DOIT RE-INVENTER LE TRAVAIL
 
Mode passagère encore liée à la modernité que confère l'outil ? Ou état devenu normal de désagrégation du fonctionnement de l'entreprise réduit à l'addition de cellules unitaires soumises au totalitarisme de l'ultra-court terme ? C'est à la fois un débat sur ce que deviennent l'efficacité et l'efficience dans l'ère post-industrielle et sur les nouvelles pathologies apportées par ces outils comme à chaque nouvelle étape du développement humain.  
 
Aussi, une réflexion s'impose sur la nature et les outils de mesure du travail numérique et sur leur adéquation aux objectifs. Il est toujours possible de limiter le cadre de la production immatérielle à des objectifs identifiés et donc atteignables. Cette réinvention du couple objet produit/temps mis pour le produire est essentielle. Il faut également admettre le droit à l'imperfection formelle, en trouvant la juste mesure. C'est bien dans la définition de ces objectifs, dans leur mesure équitable et dans la gestion de la satisfaction au travail que le management moderne doit (re)trouver bon sens et lucidité.  

 


Petit précis à l'usage d'un candidat à la présidentielle : quelle voiture pour être élu ?

Dans une compétition électorale qui s’annonce intense, chaque détail comptera… Et l’actualité récente d’un des présumés candidats met en évidence un des critères de choix des plus sensibles, quelle voiture utiliser ?

Le choix d’un véhicule révèle, n’en doutons pas, les plus intimes pulsions. C'est donc important et cela mérite une vraie analyse. Comme il a déjà été suggéré de ne plus voter contre ou pour une personne, mais d’étalonner soigneusement les candidats d’excellent à médiocre, on peut imaginer que le choix du véhicule pourrait également contribuer à affiner les critères de sélection pour être sûrs de ne pas se tromper en 2012...   Essayons alors de définir quelques critères simples…

Voiture française ou étrangère ? Là je pense que de l’extrême droite à l’extrême gauche il y aura unanimité : française ! On voit mal le candidat président rouler en Rolls Royce, qui est une voiture allemande, en Jaguar, voiture indienne ou en Volvo désormais chinoise, voire même en Porsche Panamera... Le problème est de savoir ce que signifie ce critère national : lieu de conception, de fabrication, implantation du siège social, nationalité du président de l’entreprise… Disons simplement que Renault, Peugeot, Citroën, que vous connaissez certainement mieux que Ligier, Bolloré, Mia, Lumeneo, AIM, FAM, produisent tous des voitures présumées française. Mais dans le détail c’est plus compliqué. Une Twingo est fabriquée en Slovénie, une 107 en Slovaquie. Puis les voitures ne sont finalement qu’un assemblage de composants, fabriqués ou achetés à des équipementiers, eux-mêmes travaillant avec des sous-traitants de rang 2. Il faut donc, pour être rigoureux, raisonner en pourcentage de valeur ajoutée française. Une voiture assemblée en France mais avec de l’acier Thyssen, des pneus Continental, un équipement électronique Bosch, des air-bags et ceintures Autoliv, firme enregistrée dans le Delaware, des sièges américains Lear mérite d’être analysée dans le détail pour passer l’examen… La mauvaise nouvelle pour le candidat, d’ailleurs pire encore pour le Président, c’est qu’en 2005 la France a exporté 26,2 milliards € et importé 20,6 milliards € de véhicules automobiles, alors qu’en 2009 la France a toujours importé pour 20,8 milliards € de voitures neuves mais n'exporté 13,6 Milliards !

 Au-delà du caractère français avéré de son véhicule, le candidat, pour plaire au plus grand nombre devra faire preuve d’un goût sûr… En matière automobile, tout choix est délicat ! Trop banal, ce sera du populisme, trop haut de gamme, évidemment, cela sera perçu comme éliste, arrogant, ne-comprenant-rien-aux-vraies-préocuppations-des-Français. Vraiment une mauvaise note. En matière de très haut de gamme français, les risques sont réduits si on élimine la Bugatti Veyron, vraiment too much avec ses 1000 cv, bien qu’assemblée en Alsace à Molsheim.… C6, C5 sont classiques, mais quand même un peu grosse berline pour dirigeant arrivé.  Eliminons la Renault Latitude, aux origine coréennes non dissimulables. La normande Espace, qui vient de Sandouville, est acceptable, bien classique… mais un peu trop famille nombreuse catholique peut-être ? Peut-on se rabattre sur la nordique Scenic, fabriquée en terre ouvrière, à Douai, donc plutôt à gauche. Faut-il alors oser une Laguna (éliminons le coupé, vraiment voyant)  ou une C5. Disons centre droit ?

Choisir une voiture de droite, de gauche ou écologiste est un exercice compliqué qui rappelle les querelles familiales d’antan opposant l’instituteur communiste, pro-Renault, firme nationale, fier de sa R4, le médecin centre droit, adepte de la 403, et le patron gaulliste arborant sa DS, noire de préférence. Dans le temps les choses  étaient claires !  

Essence ou diesel, voici encore un choix bien difficile… L’essence a quelques mérites, sa combustion n’émet pas de particules, mais la consommation est un peu supérieure au diesel… Quant à l’hybride, c’est électoralement difficile à expliquer car il n’y a qu’un modèle français, la Peugeot 3008 Hybrid4 diesel… belle voiture, mais il faudra rentrer dans le débat difficile qui oppose PSA qui parie sur l’hybride plus que sur l’électrique, acheté chez Mitsubishi, alors que l’éternel rivale Renault repousse avec dédain l’hybride pour se jeter dans les bras de ses belles Zoe, Fluence, Kangoo et Twizzy électriques... Bien, l’électrique, souple, nerveux, silencieux, sans rejet au lieu d’usage. Mais comment « électrique » ? Eolien, solaire, ato… ?  Quel est le bon choix pour la France ? Je vois bien un candidat EELV ( si on simplifie par EL cela donne bien EV, comme Electric Vehicule, gagné)  rouler en électrique solaire, si , monsieur, je vous garantis.

Un candidat, en tout cas une certainement, pourrait rouler en Mia électrique... Mia ? Souvenez vous alors d’Heuliez, dont Mia est la nouvelle société germano-française mais  fondamentalement poitevine… devinez qui ?

Il est dommage qu’Olivier Besancenot jette l’éponge car il serait parfait en vélo à assistance électrique Matra… Parions qu’à l’extrême gauche on ira à la gare prendre son TGV seconde classe en Velib’ ou autres variantes locales en prenant bien soin d’appeler le photographe de la PQR. Mieux encore je suggère aux candidats d’exploiter les ressources du covoiturage (http://www.covoiturage.fr/ et ses confrères), excellente solution pour rencontrer les vrais-français-qui-galèrent. Il est encore tôt pour miser totalement sur l’autopartage, mais pour Nice, Rennes et bien sûr Paris… c’est un must !

Chaque candidat devra publier dans ses comptes de campagne sa production de CO2 et expliquer comment il l’a compensée.

Enfin, il peut y avoir un vrai courageux, en EADS 330…

Bon… Je résume mes conseils, et je suis prêt à me mettre à disposition des candidats comme « conseiller en image véhicule », j’hésiterai entre une berline Megane diesel 1,5 l (motorisation raisonnable que je conseille de ne pas dépasser), une 308, une C4 ou j’insiste, une 3008 Hybrid. Tout ceci est très sobre, un brin trop discret, mais l'ère du blin-bling est bien révolue. Plus audacieusement, une 508 me paraît incarner des valeurs équilibrées entre la modernité assumée et le classicisme…

 A votre disposition, chers candidats, pour une analyse plus fine et plus ciblée ! En tous cas, évitons le concours d'élégance automobile arbitré par Mme de Fontenay sur la Chaîne parlementaire...

Getatt

 


Le Conseil National du Numérique, étape de la prise de conscience politique de la valeur d'internet

Le lancement solennel dans les salons de l’Elysée par le président de la République du Conseil National du Numérique, le 27 avril, marque la fin d’une étape dans les relations parfois houleuses entre l’Etat et le monde du numérique. Toutefois, ni la nature ni la composition de cette instance ne mettent un terme aux interrogations sur  l'approche par l'Etat de la complexité de la transformation numérique du monde. La thématique, partielle, de la protection de la création intellectuelle est le symbole de cet embarras.  La naissance controversée de l'Hadopi n’a  vraiment satisfait personne, comme en est convenu le Président de la République. Toutefois, ses déclarations très ouvertes sur la nécessaire évolution de l'Hadopi ont été suivies dans l'heure par un démenti sec ce qui traduit bien la difficulté de l'exercice.

Sarkozy-cnn-320x188Néanmoins, si les mots ont un sens, il faut acter qu’un tournant majeur a été pris. Ceci devrait permettre d’accélérer la prise en compte du web dans les stratégies publiques, mais aussi rassurer, par l’exemplarité, les dirigeants d’entreprise encore frileux dans l'adoption d'une politique active de "webification" de leur système d'information.

Il faut admettre que l’irruption du fait numérique dans la société depuis maintenant une quinzaine d’années est un phénomène de rupture qui surprend encore et désarme la plupart des dirigeants. C’est pourquoi la prise de position du Président Sarkozy présente des caractéristiques intéressantes par leur franchise et leur nouveauté qu’il convient d’accueillir positivement, au-delà des intentions politiques qui ne peuvent naturellement être sous-estimées à douze mois d’échéances majeures.

Dans un discours documenté et équilibré, le Président Sarkozy a tenté de réconcilier deux mondes que tout semble opposer : celui des entrepreneurs du numérique, bruissant d'innovations, fort de cette impertinence que confère le succès exceptionnel de la transformation numérique, qui rend toutes les audaces possibles, et celui de l'Etat et des responsables politiques qui ont mal accueilli la remise en cause par le web de l'autorité, sous toutes ses formes. Reconnaitre qu’internet est un phénomène qui bouleverse le monde et que ce n’est qu’un début est un fait nouveau à ce niveau de l’Etat. L’affirmation est forte et sans ambiguïté : « Le rôle de l'État, c'est d'abord de reconnaître qu'Internet est un formidable progrès. C'est un progrès et cela doit être vécu comme tel. C'est une terre d'entrepreneurs où tout est possible. »  

L’analyse de l’impact économique du web fait par le président reprend certes des données connues, notamment la récente étude sur l’impact du web sur l’économie française, faite par McKinsey. Le rappel de ces données ravit tous ceux qui militent pour une intégration à tous les niveaux de l’entreprise, des collectivités publiques et de l’Etat, de toutes les conséquences  de cette puissante réalité. Internet et le web sont les vecteurs d'un transformation économique sans précédent. Il ne suffit plus de l'affirmer, il faut le mettre en pratique et pour cela balayer les inhibitions et gérer dynamiquement les risques en abandonnant notre si efficace réflexe d'édifier des lignes Maginot. 

Le constat formel et appuyé par le Président de la légitimité de la transformation numérique est un fait nouveau, qui tranche avec certaines foucades anti-internet de plusieurs ministres. « Le changement qu'apporte Internet ne se lit donc pas seulement à l'échelle d'un changement de modèle économique ou de choc des générations, il se lit à l'échelle de la civilisation toute entière. C'est ce qui fait d'Internet un sujet incontournable. » Reconnaitre qu’internet bouleverse de façon inconfortable les pratiques, les savoirs et les hiérarchies est sans conteste un regard nouveau du pouvoir politique qu’on ne peut pas  sous-estimer. Admettre que non seulement la France n’est pas hostile à internet, mais s’illustre par un taux d’adoption rapide des nouvelles pratiques est également encourageant.  « Les Français sont particulièrement actifs sur ces plateformes : 14 millions de blogs, Skyblog est le premier éditeur de blogs en Europe, et nous sommes 20 millions de Français sur Facebook. L'image d'une France rétive à ce nouveau monde est absurde. Internet est un formidable outil pour décupler notre capacité de connaître et d'échanger, d'aller au-devant de l'autre. Il n'est pas envisageable de s'en passer. ».

Le Président n’a pas passé sous silence le caractère déstabilisant de l’internet qui bouleverse les emplois et les compétences et induit des changements inéluctables qui imposent une adaptation permanente des emplois et des compétences.  « Le numérique est parfois vécu comme une menace pour qui maîtrise mal ses outils. La fracture numérique n'est pas qu'une question d'équipement et d'infrastructure, c'est aussi une question de formation. La fracture numérique, c'est ce que vit le travailleur qui se rend compte que son entreprise lui demande de changer de métier, parce que le progrès des technologies lui impose de devenir ouvert à cette nouvelle technologie et qu'on ne saurait travailler avec quelqu'un qui ne comprend pas que ce n'est pas le monde de demain, c'est le monde d'aujourd'hui. »

Enfin les limites du net, maintes fois exploitées pour en réduire les mérites, ne doivent plus suffire à en nier la puissance de transformation. «  Les sources d'information sont innombrables simplement leur abondance suffit-elle à former le jugement et l'esprit critique ? Non, mais ce n'est pas pour cela que ce n'est pas un progrès. ».

Il faut donc reconnaître que ce discours apporte un ton nouveau au débat et apporte un signal stimulant et salutaire attendu depuis fort longtemps bien au-delà du cénacle réduit des acteurs de l’économie numérique.

Dès lors, il faut en revenir aux faits, c’est à dire à la portée de ce nouveau Conseil National du Numérique.

Pourquoi faut-il que l’Etat se donne d’une structure d’information et de concertation pour comprendre l’ampleur des transformations apportées par internet et le web ?

La tentative n’est pas nouvelle.

En mars 2004, le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, sensible aux  enjeux de l’économie numérique et aux symptômes de  « retard français », crée le Conseil supérieur des technologies de l’information, « ayant pour mission d'éclairer, par la confrontation des points de vue et des analyses, les choix stratégiques du Gouvernement dans le domaine des technologies de l'information. ». Cette initiative de Jean-Pierre Raffarin mettait en perspective la complexité du champ et ouvrait à des personnalités des différentes composantes de la société - industriels, fournisseurs de services, éditeurs et diffuseurs de contenus, organisations représentatives - la possibilité de participer à la définition de la politique gouvernementale. Les compétences du CSTI étaient  vastes et la préparation des travaux par le Conseil général des technologies de l’information assurait  la qualité, la continuité et la cohérence de ses réflexions. « Le conseil stratégique des technologies de l'information examine les questions qui lui sont soumises par le Premier ministre. Il peut lui adresser toute proposition concernant son domaine de compétence. Il formule notamment des recommandations pour la conception, la préparation, la mise en œuvre et l'évaluation des actions entreprises dans le cadre de l'action gouvernementale pour le développement de la société de l'information et des programmes communautaires correspondants. Il est consulté sur l'évolution des filières de formation dans les secteurs des technologies de l'information et de l'économie numérique. Il peut également examiner des questions qui lui sont soumises par un membre du Gouvernement. »

Malgré la qualité de ses réflexions, la rigueur de son animation sous la responsabilité de Jean-Michel Hubert, la CSTI négligé par le successeur de Jean-Paul Raffarin, a été lentement réduit au silence.

Le CNN en est le successeur, mais traduit d’autres choix que le Président a justifiés, en s’éloignant notamment des préconisations du rapport qu’il avait demandé à Pierre Kosciusko-Morizet. Constituer un outil représentatif des enjeux de l’économie numérique n’est pas en effet un exercice facile car, fondamentalement, le fait numérique englobe l’ensemble des problématiques de la société contemporaine. Chaque institution, dans son champ de compétences, se doit donc d’introduire la dimension numérique à son juste niveau. C’est vrai du Parlement, des collectivités locales, des entreprises comme des organisations de consommateurs. Alors pourquoi persister à vouloir créer une structure vouée à ne pas susciter l’enthousiasme… de tous ceux qui en sont exclus !

Le choix est original parce qu’il s’appuie non pas sur des structures représentatives mais sur des personnes reconnues dans la profession pour leur capacité d’entreprendre et leurs succès. « J'ai voulu y rassembler des personnalités compétentes de l'Internet français, en majorité des entrepreneurs, pour que sur tout projet - je dis tout projet - de disposition législative ou règlementaire, susceptible d'avoir un impact sur l'économie numérique, le gouvernement soit obligé de demander votre avis et bénéficie de l'éclairage qui émanera du secteur en cause. » 

Le pari est clair : plutôt que de créer un « parlement du numérique », aux membres élus et/ou désignés par de strsctures représentatives, le Président fait confiance à des entrepreneurs du net, qu’il a choisi, pour conseiller le gouvernement sur toutes les questions, sans limite, concernant l’économie, le droit et de façon large la culture de l’internet. « Je veux que le CNN représente votre univers et nous donne votre sentiment ». Les personnes choisies ont le mérite d’être incontestables dans leur expérience et même si leurs intérêts peuvent être divergents ils constituent un groupe cohérent. Le Conseil national du numérique, libre et indépendant, doit être consulté sur tous les thèmes qui touchent l’action publique dans le champ de l’internet mais peut aussi se saisir de toute sujet.

Contestable, et contesté, ce choix d’organisation, assumé, a du sens. Le véritable sujet est bien de doper la stratégie publique d’une vision opératoire de l’internet et du web, réalités complexes et appelées en permanence à évoluer et dépassant d’ailleurs le cadre national et européen. Internet, né américain, et le web sont désormais mondiaux. Mais cette vision doit entrainer la communauté sans représenter simplement l’intérêt compréhensible des fournisseurs d’accès internet, tous représentés, et des firmes les plus dynamiques du e-commerce, même si, habilement, certains membres ont aussi une casquette de représentation plus large que leur propre expertise. Car la révolution numérique ne se limite pas aux acteurs déjà engagés dans le monde numérique, « pure players » ou fournisseurs d’accès internet. Elle implique toutes les entreprises, toutes les activités. Internet et le web en sont le vecteur et le symbole de la révolution numérique. Mais il faut qu’au-delà de cette dynamique, les fondamentaux en équipement et en culture numérique se diffusent dans toutes les entreprises, notamment les PME et TPE qui souvent, faute de maîtrise et de confiance, restent en dehors du chemin.

Il faut, pour l’intérêt collectif, que l’alchimie  du CNN fonctionne. Tant reste à faire.

 Les 18 membres

Gilles Babinet (CaptainDash, MXP4, Eyeka), président
Patrick Bertrand (Directeur Général de la Cegid et président de l'Afdel), 
Jean-Baptiste Descroix-Vernier (Rentabiliweb), 
Giuseppe De Martino (Dailymotion.com, vice-président de l'Asic), 
Frank Esser (SFR, président de la Fédération Française des Télécoms), 
Emmanuel Forest (Bouygues Telecom), 
Gabrielle Gauthey (Alcatel-Lucent), 
Pierre Louette (Orange), 
Daniel Marhely (Deezer.com), 
Alexandre Malsch (Melty.fr), 
François Monboisse (Fnac.com, président de la Fevad), 
Xavier Niel (Free), 
Jean-Pierre Remy (PagesJaunes.fr), 
Marie-Laure Sauty de Chalons (AuFéminin.com), 
Marc Simoncini (Meetic.com), 
Jérôme Stioui (Directinet et Ad4Screen), 
Bruno Vanryb (Avanquest Software, président du collège Éditeurs de logiciels du Syntec Numérique), 
Nicolas Voisin (Owni).