Chronique des salons automobiles : Bruxelles 2010
26 janvier 2010
Le monde de l’automobile prise ses salons qui, une fois par an, rassemblent curieux et passionnés autour de la culture automobile. A l’ère du web, des blogs et des forums où l’on peut tout apprendre sur les voitures, les salons pérennisent au-delà des modes la réalité bien tangible de l’automobile, la courbe d’une carrosserie, l’habitabilité réelle et la nature de la finition. Un salon, c’est un rituel où l’on se presse pour admirer la dernière Ferrari ou Rolls Royce, aussi bien que pour étudier sous tous ses angles une plus modeste Fiat ou Opel. Tout est fait pour que le public puisse célébrer les charmes de l’automobile, s’extasier devant les concept-cars aussi bien que se livrer à une analyse comparative des astuces plus basiques des constructeurs pour attirer le chaland, distribution de goodies et hôtesses soigneusement choisies. Aussi, il est frappant, et réconfortant pour l’industrie, de voir un jour de semaine une foule populaire se presser dans un salon automobile. Le salon de Bruxelles a ainsi attiré plus de 600000 visiteurs.
Mais cette fête est aujourd’hui ternie par la crise automobile. La crise, en cassant le rêve, fait éclater l’absurde des sur-motorisations et surconsommations et rappelle durement que la voiture est avant tout pour chacun un objet utilitaire et coûteux qui impose le réalisme. Les salons actuels mettent en exergue la faible consommation et vantent les solutions de propulsion alternatives « vertes », hybrides, électriques et aussi le gaz naturel. Ils mettent en avant le sens des responsabilités des constructeurs soucieux d’environnement et de sécurité.
Le ton est partout à la rigueur et à la discrétion. Les budgets marketing sont plus serrés. Les stands sont plus sobres, les voitures plus humbles, les concept cars ont déjà été vus. Après Detroit qui du 11 au 18 janvier a mis en scène la résurrection de l’automobile américaine, et avant Genève, en mars, le salon de Bruxelles remplit une fonction intéressante et bien triviale, vendre des vraies voitures à un vrai public. Bruxelles, dont c'était la 88e édition, a toujours été un salon commercial et permet au marché européen de prendre le pouls de la demande en début d’année.
Mais 2010 est assez cruelle pour l’industrie automobile en Belgique, pays qui avait su attirer en terrain neutre les usines des grands constructeurs européens, et qui voit se rétrécir son industrie automobile, car il est plus facile pour un constructeur de se retirer d’un pays tiers que de son pays d’origine. Ainsi après la fermeture de l’usine Renault de Vilvoorde en 1997, le ralentissement d’activité de l’usine Volkswagen de Bruxelles, c’est au tour d’Opel d’annoncer en janvier 2010 la fermeture de l’usine d’Anvers avec ses 3500 salariés.
Il a aussi dans ce salon des signaux tristes. Saab présente sa nouvelle hypothétique berline 95, tant attendue mais qui apparaît au moment où la marque est cliniquement morte, abandonnés à son sort par GM. Le stand arbore fièrement des panneaux avec un cœur et un slogan presque touchant « We love Saab ». Chrysler présente une gamme surannée et inadaptée, là encore en sursis.
Mais Bruxelles ouvre aussi des voies d’espoir dans la transformation du marché. Une partie importante est consacrée, sous l’égide de GDF Suez, au véhicule électrique. On peut essayer une Volvo C 30, une Mini-E, une Mitsubishi i-Miev, et contempler le déjà mythique roadster Tesla. Sur une courte piste, l’essai routier permet de confirmer qu’un véhicule électrique est une voiture agréable et séduisante. Totalement silencieuse, elle offre des accélérations remarquables et un confort tout à fait conforme au modèle d’origine. Si la Mini électrique est encore un prototype et exhibe une motorisation de 200 cv, la i-Miev, déjà en vente au Japon, est désormais aboutie. On peut d’ailleurs observer à quelques pas sur les stands du groupe PSA, en première présentation mondiale, ses cousines Citroën C-Zéro et Peugeot Ion, qui seront sans aucun doute les vedettes du Mondial de Paris cet automne.
C’est d’ailleurs le groupe PSA, que l’on disait timide sur le véhicule électrique, qui déploie le plus d’effort pour démontrer son engagement sur ce segment nouveau, présentant notamment un concept car, BB1, équipé du système de roues arrières à moteur électrique intégré développé par Michelin.
BB1
est destiné à être produit en série. Plus
encore Peugeot dévoile son 3008 Hybrid4 à motorisation diesel hybride électrique (2l
diesel, 163 cv et 37 cv électrique), un quatre roues motrices promis pour 2011
aux performances prometteuses (99 g/CO2/km) ainsi que le coupé RCZ hybride, ave
un taux d’émisison de 95 g/CO2/km présenté en tant que concept car mais très
proche du modèle définitif. Mais la préoccupation de la consommation et des
rejets est aussi très mise en évidence sur les véhicules classiques, la
nouvelle C3 et la tonique DS3 se flattant de descendre au dessous du seuil de
100g/Co2 par km. Peugeot a lancé à Bruxelles son challenge « Peugeot Eco
Cup » concours destiné à sensibiliser les conducteurs européens à une
conduite responsable.
Renault largement engagé sur le véhicule électrique présente à nouveau le concept de recharge rapide par remplacement du pack de batteries en trois minutes, le système QuickDrop, et met en valeur la Fluence, berline au design flatteur qui sera, dans sa version électrique, au cœur du projet BetterPlace en Israël et au Danemark.
Renault
tient également à participer à l’effort global de réduction des consommations des moteurs conventionnels avec sa
Clio équipé du Dci 90 cv qui affiche 99 g CO2/km.
Volkswagen croit, comme BMW, à l’avenir du moteur à combustion interne optimisé en déployant son offre BlueMotion à travers sa gamme de petites voitures, Polo (moteur diesel 1,2 l, 87 g CO2/km) et Golf (99 g CO2/km) et moyennes (Passat BlueMotion 118 g CO2/km) dont les performances élevées en matière d’émission de CO2 sont dues à l'adoption du système Stop-Start, de boîtes au rapport long, de peneumatiques à faible résistance et d'un design aérodynamique soigné.
BMW décline sur toute son offre son approche « Efficient dynamics » et présente un X6 hybride encore bien gourmand et son concept car hybride et électrique Vision aux lignes futuristes.
Le groupe Toyota peut se flatter d’avoir été le premier à industrialiser un véhicule hybride dans l’indifférence générale. Toyota met justement en valeur le niveau de compétitivité globale atteint par son modèle emblématique, la Prius, qui entre dans sa douzième année et a déjà été livré à plus de 1,2 millions d’exemplaire, ce qui représente évidemment un banc d’essai considérable qui donne à Toyota une longueur d’avance sur ses tous ses concurrents, y compris Honda dont la nouvelle berline Insight est jugée moins accomplie.
De salon en salon, on peut évaluer les progrès de l'industrie qui joue actuellement une partie économique difficile pour se renouveler, faire évoluer les goûts des consommateurs par des produits attractifs et performants et créer une nouvelle dynamique industrielle. Les motorisations électriques commencent à devenir une solution de court terme, puisqu'en 2010 et 2011 vont s'affronter sur le marché européen plusieurs modèles occupant divers segments du marché. Mais les solutions hybrides ont également de solides arguments pour séduire avec une capacité d'autonomie rassurante pour les clients. Enfin, l'optimisation des motorisations diesel contribuent à baisser efficacement le taux moyen d'émission de CO2. Il est indéniable que l'industrie réagit vite au nouveau contexte environnemental. Il reste à observer les réactions des clients qui ont besoin de comprendre ces nouvelles offres qui, de fait, rendent les choix plus complexes. Les signaux de prix résultant des efforts de constructeurs et des incitations gouvernementales devront être clairement lisibles par le marché, tant en coût d'acquisition que d'usage.
Prochaine étape : Genève en mars.