Previous month:
juin 2009
Next month:
août 2009

Retour aux sources de l'innovation

Pour les jeunes de la génération Y, l'informatique n'est pas un sujet d'histoire. Néanmoins, pour comprendre d'où viennent les objets d'aujourd'hui et à quoi vont ressembler les objets connectés de demain, il est indispensable de jalonner l'histoire de cette jeune technique, qui bien que courte, est fertile en transformations rapides. Ce n'est que le début...

 

L’évolution de l’informatique a été marquée par trois tendances lourdes aux cours des trente dernières années. L’addition de ces transformations ouvre la voie à un changement total dans la nature même de l’informatique et du traitement de l’information dont nous ne percevons encore aujourd’hui que de prometteuses prémices :

-          Accélération exponentielle des performances

-          Conquête de la « mobiquité » = mobilité + ubiquité

-          Démocratisation


1/ L’accélération exponentielle des performances

Que ce soit dans la puissance des processeurs, la capacité des mémoires, la bande passante des télécommunications, les progressions exponentielles des performances de chaque composant de la chaîne de traitement de l’information a permis de découvrir et de s’approprier des usages de plus en plus confortables, diversifiés et imaginatifs . La leçon de cet apprentissage est que l’innovation va toujours au-delà de ce qu’imaginaient ses promoteurs dès lors qu’elle répond à un besoin latent. Les sceptiques sont vite débordés par la puissance de la vague d’adoption d’usages nouveaux , les délais se raccourcissent entre les annonces techniques et la mise en service commercial.

Prenons trois exemples:


   La téléphonie mobile

-          La premier téléphone mobile analogique, dit de première génération 1G, Radio Com 2000, né en 1986, était limité aux véhicules, avec des appareils encombrants : Il y eut 60000 abonnés. C’était un produit élitiste.

Radiocom 2000 Sagem Radiotéléphone mobile Sagem de première génération

-          La première génération de téléphones mobiles numérique avec la norme GSM, 2G, adoptée en 1982,  a commencé à se diffuser en France à partir de 1991 avec une bande passante de 9,6 kbit/sec

-          La troisième génération numérique à haut débit , ou 3G, est annoncée en 2002 et l’offre commerciale démarre dès 2004 avec 384 kbits/sec débit largement suffisant pour commencer à exploiter les services de mobilité astucieux, incarnés dans l’iPhone né seulement en juillet 2008

-          La 4G  avec 1 Mbit/sec est annoncée pour 2010


La capacité de stockage

Il en est de même avec les capacités des stockages des mémoires flash dont les performances sont à la base des succès que sont les baladeurs numériques, les appareils photos , les outils de stockages mobile. La première clef USB a été commercialisée en décembre 2000 avec 8 MB de mémoire, soit 5 fois plus que les disquette de l’époque, limitées à 1,44 Mo. Aujourd’hui les modèles courants de clefs USB contiennent 4 à 8 GigaBit pour moins de trente euros.


-  Les micro-ordinateurs portables et l’accès à l’internet

Si globalement la micro-informatique, depuis 1981 et le premier IBM PC, a représenté en soi une révolution dans l’accès à l’information numérique, c’est sûrement l’ordinateur mobile qui en a radicalement changé l’usage. Le premier portable fut créé en 1981, l’Osborne 1, et pesait 11 kg avec 64 ko octet de mémoire. C’était une impressionnante valise . Il se vendait 1800 $, soit l’équivalent actuel de 2200 €. Un netbook de 1200 g avec 1024 Mo de mémoire coûte moins de 300 €.

Osborne1_2 Ordinateur (trans)portable Osborne 1 de 1981


2/ La conquête de la « mobiquité »

Pendant près de quarante ans, l’informatique était pour la plupart de ses utilisateurs confondue avec le terminal d’accès  aux services, le couple écran/clavier qui reproduisait la machine à écrire et un mode d’organisation du travail statique, assise et hiérarchique. Parce que la technique a permis d’alléger les machines, de les rendre plus fiables, plus autonomes, on dissocie désormais  l’accès à l’information de son support matériel. On a conquis le droit de travailler, de s’informer, de se distraire où on veut, quand on veut, avec n’importe quel objet communiquant. Ainsi l’informatique se dilue dans les usages que l’on en fait, de façon contextuelle. Il suffit de prendre le TGV pour voir que chacun dispose maintenant d’une forme diversifiée de terminal, aux services multiples… La notion de poste de travail unique, qui a été une première conquête des DSI pour rationaliser leur parc en vue d'améliorer la qualité de service est en train de se dissoudre.

Les objets communicants se multiplient et internet est désormais accessibles à partir de plusieurs plate-formes, donnant le choix de la disponibilité d’accès et de la forme de l'objet communicant. Ceci se résume dans l'acronyme ATAWAD, cri de guerre de la génération Y : AnyTIme Any Where Any Device !


3/ Démocratisation

Le moteur technologique est tellement puissant que les performances doublent tous les dix-huit mois à prix constant. De plus la technique facilite l’interface homme/machine, abaissant sans cesse la barrière de l’accès technique qui se banalise. De ce fait l’accès à la technologie se diffuse dans toutes les couches de la société, permettant des usages inimaginables il y a encore 15 ans .

 Il y a aujourd’hui 58 millions d’abonnés au téléphone portable en France, 4 milliards dans le monde ! On dénombre 1,7 milliards d’accédants à internet. Évidemment la démocratisation conduit au développement d’une immense capacité non seulement de « réception » de message comme ce fut le cas avec la presse écrite, la radio et la télévision mais d‘émission  ce qui inverse le flux historique de diffusion de l’information et de la connaissance. Parce que la technique autorise une vraie démocratisation, on peut concevoir, écrire, diffuser textes, images, vidéos documents multimédia avec des moyens financiers très limités et un bagage technique tellement minimal qu'il devient entièrement intuitif.


Ce texte sert de trame à mon intervention pour « Les dossiers de BFM » consacrés à l’innovation, en compagnie de Nicole Aubert, professeur en Psychologie et Sciences sociales à l’ESCP-EAP, Rafi Haladjian, co-créateur de la société Violet, pionnier de l’internet des objets avec notamment son fameux lapin Nabaztag, et Jean-Philippe Vanot, directeur exécutif de France Télécom en charge de l’innovation, de la R&D et du marketing de l’opérateur.

L’émission sera diffusée une première fois le samedi 18 juillet à 14 heures, puis les dimanches 2 et 23 août à 13 heures.

Elle sera également disponible en podcast dès le 20 juillet  sur bfmradio.frLogo bfm


Publicité, publications...

Quelques media m'ont demandé récemment de m'exprimer sur des sujets de réflexion quant au développement de la société de l'information et des outils informatiques. Il est toujours utile de sortir du cadre quotidien, rendu un peu sombre par les contraintes du court terme, pour se projeter dans une réflexion moins immédiate. Mes convictions restent entières : les technologies de l'information, de la communication et de la connaissance n'en sont encore qu'à l'aube de leur développement. 

Au moment où les entreprises s'ingénient à baisser le coût de leur informatique, ce qui n'est pas malsain en soi dès lors qu'il ne s'agit que de bonne gestion et pas d'acharnement, elles doivent aussi considérer que le monde de web est un environnement d'une toute autre nature que l'informatique classiques des années soixante dix qui a atteint son asymptote. il ne s'agit plus d'automatiser des processus qui pourraient être exécutés manuellement. Il s'agit maintenant d'inventer des produits et services qui ne pourraient en aucun manière être conçus, réalisés, distribués sans des moyens puissants de traitement de l'information. Il ne s'agit plus du tout de mieux faire les choses, mais de faire des choses totalement différentes. Or, au terme d'un cycle long de croissance fondé sur la technologie pétrole/automobile/informatisation centralisée, nous sommes en panne d'innovation pour résoudre les problèmes complexes de notre époque. Selon la belle formule de Joël de Rosnay, nous allons passer du prolétaire au pronétaire*. Investir dans le traitement de l'information est donc un impératif dès lors que l'on considère que l'avenir est aux entreprises et aux pays qui entreront de plain pied dans la société de la connaissance. La frilosité actuelle des dirigeants, d'une autre génération, ne peut servir de politique à long terme. 

C'est pourquoi j'ai accepté avec entrain de relever le défi que m'a lancé Pierre Couveinhes, rédacteur en chef d'une des plus anciennes revues françaises, les Annales des Mines, créée en 1794, de  tenter de décrire ce que serait l'informatique dans vingt ans. Cet article a été publié dans le numéro de mai 2009 de Réalités industrielles entièrement consacré aux technologies de l'information et de la communication... L'exercice est aussi périlleux qu'excitant. Si le résultat n'est pas à la hauteur de mes espérances, les pistes à suivre étant si nombreuses et leurs ramifications si complexes, il marque une étape qu'il sera toujours amusant de vérifier dans quelques années. 
01 informatique l'a publié dans son édition en ligne :
http://www.01informatique.fr/infrastructures-stockage-serveurs-116/Information-connaissance-et-informatique-en-2028/
Il est tout aussi intéressant de se procurer la version intégrale du numéro de mai qui contient des analyses percutantes. Au moment où les TIC semblent susciter moins d'attention de la part des décideurs, l'initiative des Annales des Mines représente un effort salutaire de réflexion sur ce domaine qui demeure plus que jamais un vecteur majeur de transformation de l'économie et de la société.

Du papier à la télévision, il n'y a qu'un pas, numérique, à franchir. La jeune web TV Omega TV m'a demandé de commenter l'évolution technique et sociétale du web à partir des réflexions de "Le Web, 15 ans déjà... Et après ?". Cet exercice prend la forme de  cinq séquences vidéo didactiques :
http://www.omegatv.tv/video/27680297001/societe/medias/Internet--les-2-risques-.php

Enfin pour compléter cette panoplie des media, je suis sollicité par BFM radio pour une émission d'une heure qui passera le 14 juillet sur les promesses de l'internet et du web. 

La société de l'internet est plus que jamais la société de la complémentarité des médias. Livres, revues, vidéos et radios, ainsi que le blog, permettent, chacun avec leur spécificité, de développer une vision à 360°. Il s'agit sans relâche de comprendre que nous abordons un monde nouveau qui ne ressemblera pas vraiment au monde que nous sommes en train de quitter dans la crise. Le web n'est pas simplement un outil de plus, c'est une plate-forme d'énergie cognitive diversifiée aussi puissante que l'écriture ou l'imprimerie en leurs temps. 

* http://www.pronetariat.com/