Le e-père Noël est asiatique
29 décembre 2006
Sous les sapins de Noël des pays développés se sont entassées comme chaque année désormais les merveilles de l’électronique grand public qui attirent sans réserve les faveurs des adultes comme des enfants. La liste de ces objets est impressionnante : tout ce que l’industrie a inventé au cours des dernières années pour créer, échanger, reproduire, stocker, diffuser les productions numériques, musique, image, vidéos, jeux. Dans cet inventaire à la Prévert les vedettes demeurent l’iPod et ses produits dérivés, les appareils photos numériques, dont le marché commence toutefois à être saturé, les téléviseurs haute définition, les caméras vidéos, les consoles de jeux, enjeu d’une guerre féroce, les téléphones portables, déjà banalisés…
Tous ces appareils ont un point commun : ils ne sont pratiquement plus fabriqués en Europe ni aux Etats-Unis.. Ils ont un second point commun : leurs prix de vente baissent de façon continue grâce à un système de production mondial très performant conçu autour d’une chaîne de valeur dont le cœur est désormais en Asie. L’Asie produit 40% de tous les composants électroniques mondiaux, la Chine en représentant quant à elle16%. Les exportations de produits électroniques représentent 34% des exportations totales de la Chine. Au fil des années, le mode de production a évolué rapidement pour sortir du modèle simple de la sous-traitance pour s’appuyer sur un système sophistiqué de répartition des responsabilités entre les acteurs asiatiques.
Derrière les marques connues, Apple, Sony, Philips, HP, Dell… se cachent en effet des producteurs que le grand public ne connaît pas. 41% de la production électronique de la Chine se fait pour le compte des compagnies internationales, mais la part du marché domestique croît très rapidement ainsi que les marques nationales. Des firmes comme Lenovo (PC), Huawei ( télécommunications), TCL, Haier,, devenu troisième producteur mondial de produits blancs, mais également puissant dans les téléphones et les téléviseurs LCD, ZTE (télécommunications) commencent à être connus non seulement des spécialistes mais aussi des consommateurs.L’industrie électronique asiatique évolue du concept d’OEM (« original Equipment Manufacturer ») vers celui d’ODM (« Original Design Manufacturer »), qui est la spécialité des firmes taiwanaises (Quanta Computers, Compal Electronics, devenu le premier producteur d’ordinateurs portables au monde, Wistron, Asustek, Inventec…). Ces firmes produisent des ensembles complets qui sont généralement fabriqués en Chine continentale et commercialisés sous une marque internationale. Les analystes de l’industrie électronique parlent des performances de la « Chinese connection », ensemble complet de fournisseurs qui peuvent prendre en charge la totalité de la chaîne de valeur. Mais les coréens Samsung et LG exploitent également ce modèle.
E n Chine, d’immenses conglomérats industriels regroupant des centaines de milliers d’ouvriers se chargent de l’assemblage. Ces usines important des composants des voisins asiatiques pour exporter des produits finis. Ainsi Foxconn ( marque de la firme taiwanaise Hon Hai Precision Industry) emploie en Chine 160000 salariés dont le salaire se situe autour de 100 $ par mois pour 60 heures de travail hebdomadaire ; elle fabrique notamment le iPod. Nano, la PlaysStation, certains téléphones Motorola et Nokia, des cartes mères pour toute l’industrie des PC, notamment HP. Hon Hai était classée en 2005 19e fournisseur mondial de biens électroniques avec 27 milliards $ chiffre d’affaires et un taux de croissance de 110%. ;
Le port de Shanghai est devenu en 2005 le plus grand port du monde avec 18 millions de conteneurs, bras armé de la mondialisation, et 443 millions de tonnes traitées.
L’Asie entend bien consolider ses positions dans ce domaine en montant en gamme. Si la Chine produit 38% des téléviseurs mondiaux, sa production migre des classiques tubes cathodiques vers les écrans plats LCD. Le marché des téléviseurs LCD de plus de 40 pouces est florissant en Chine . Les producteurs asiatiques attaquent résolument le marché professionnel, notamment le marché médical. Et l’Inde ne se contente plus, depuis longtemps, de produire du code informatique à bon marché, mais se positionne également sur le marché électronique.
Les positions européennes sont bien évidemment très fragiles dans le marché domestique, car si de grandes marques subsistent, comme Philips, l’outil de production est désormais en Asie. Il faut toutefois souligner dans ce contexte morose la combativité technologique et commerciale du fabriquant français de consoles audio-vidéo, Archos qui se déploie sur tous les marchés, y compris en Asie. La conséquence de cette désaffection (capitulation ?) européenne est une balance commerciale des produits électroniques lourdement déficitaire. La relance de la consommation se traduit automatiquement par le creusement du déficit commercial.
Il serait dangereux de penser que seul le marché de l’électronique professionnelle pourra permettre à l’Europe de tenir son rang dans ce domaine critique car il est indispensable de disposer d’un système global de supply chain pour bénéficier des effets d’échelle et de recherche développement.
Source : http://www.isuppli.com/
http://www.industrie.gouv.fr/biblioth/docu/4pages/pdf/4p227.pdf
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