De la mondialisation : les technologies responsables ?
Dell, version 2.0 ?

L'informatique à l'école...

On nous répète sans cesse que, dans notre république, depuis Jules Ferry l’éducation est le moteur de l’ascenseur social. Que la France, pays des lumières, mère des libertés et des droits de l’homme, est un modèle que le monde entier nous envie…
Ne rêvons plus et parlons chiffres, même si cela peut paraître vulgaire ! L’OCDE vient de publier son enquête sur l’école « Regards sur l’éducation » qui devrait être le livre de chevet de tous les candidats à l’élection présidentielle de 2007. Franchement, les chiffres sont mauvais et font mal… En gros, la lourde machine éducative est à la fois peu efficace et peu efficiente : horaires surchargés pour les élèves (10 % de plus que la moyenne des pays de l’OCDE), coûts élevés, sauf dans le supérieur, résultats moyens. Ces données ne sont pas une découverte pour les responsables. Elles devraient susciter un peu d’attention des électeurs. Car l’économie de la connaissance commence à l’école, qui produit les « cerveaux d’œuvre » de demain.

Mais un point particulier m’a mis vraiment en colère : en France le nombre d’ordinateurs pour 100 élèves est encore de 13 contre 30 aux Etats-Unis, 28 en Australie, 27 en Corée du Sud, 23 au Royaume-Uni et en Hongrie, 22 au Canada… seules l’Allemagne et l’Espagne font moins bien que nous, avec 8 ordinateur pour 100 élèves, et il n’y a nulle raison de s’en réjouir.

J’entends déjà les fins analystes expliquer que même si les Etats-Unis ont plus d’ordinateurs, en raison certainement du lobby des constructeurs américains, preuve formelle de la collusion de l’appareil militaro-techno-industriel avec le pouvoir ultra-libéral, ils ne font pas mieux que nous en taux d’obtention d’un diplôme de fin d’études secondaire. Parlons alors de la Corée du Sud, où le redoublement est inconnu alors que nous en sommes champions du monde, qui a un bien meilleur résultat en mathématiques que les jeunes Français alors que le pourcentage de temps qui est consacré à cette matière y est bien moindre ( 11% contre 15 % en France) et qui dispose de plus de deux fois plus d’ordinateurs… Oui, bien sûr, mais ce sont des Coréens, disciplinés, et sûrement brimés dans leur découverte personnelle des apprentissages. Quid alors de la Finlande, où les enfants, qui travaillent moins également, sont les plus diplômés de l’enseignement supérieur des pays de l’OCDE (avec la Nouvelle-Zélande) et sont également meilleurs en mathématiques ?

Certes ces statistiques ne représentent qu’une piste, il faut compléter par d’autres analyses. Il est un fait que les plans successifs d’introduction de l’informatique à l’école ont tous été des échecs, plus ou moins avoués. Simplement parce que les responsables de ces politiques, souvent compétents et militants du développement des technologies de l’information, n’ont pas été compris ni par les ministres de l’éducation et les inspecteurs généraux qui font les programmes, ni par les élus qui financent les équipements. Parce qu’un ordinateur dont l’usage n’est pas inséré dans les programmes ne sert à rien. Parce qu’un ordinateur (qui marche) pour 10 enfants est inexploitable pour l’enseignant. Parce qu’un ordinateur qui n’est pas dans la classe reste un objet exotique comme le fut, avec le même succès, la télévision scolaire, alors qu’il devrait être au appui familier à chacun, notamment à ceux qui ont besoin de soutien scolaire. Quels sont les résultats réels de l’initiative, prise en 2000 avec beaucoup de bonnes intentions, de faire passer le brevet informatique et internet ( B2I) à l'école et au collége ?

Or la maîtrise de l’informatique comme support d’une activité cognitive est bien une des clefs fondamentales de la performance économique de demain et donc de la création de richesse collective. Ce ne sont pas les objets qui doivent intéresser – bien qu’une salle équipée s’inaugure mieux devant les journalistes de la presse locale qu’un logiciel pédagogique – mais les projets pédagogiques qui intègrent l’ordinateur, c’est à dire les logiciels et l’usage de l’internet, pour atteindre des objectifs d’acquisition de connaissance. Dépassons également les querelles sans fin qui opposent les enseignants adeptes du « monde libre » et ceux qui utilisent des systèmes d’exploitation propriétaires. Franchement, quelle importance au regard des enjeux, même si le débat n’est pas vain en soi ? Ne mélangeons pas comme avec le TO7 en son temps politique industrielle, lutte contre les monopoles et politique éducative. On ne connait les résultats...

Il est grand temps d’externaliser de façon contrôlée la gestion des parcs et des réseaux à des professionnels compétents et de mettre tous les moyens internes de l’appareil éducatif sur les contenus et la formation des maîtres en partenariat avec les éditeurs.

Sinon, ce sera aux parents inquiets de continuer à acheter Adibou sans référence pédagogique et au pouvoir éducatif d’accepter tacitement de faire de l’usage de l’informatique un outil qui renforce les inégalités.

Commentaires

Denis Szalkowski

D'accord avec vous sur le constat, sur le diagnostic. En revanche, je ne partage en rien votre conclusion.

Votre plaidoyer pro-domo sur l'externalisation dont on ne comprend pas complètement les circonvolutions est une solution fort coûteuse. On peut en imaginer bien d'autres Et notamment intégrer dans le service public des cellules d'appui aux enseignants et aux parents (?). Ces cellules existent dans chaque inspection à l'état embryonnaire. Elles marchent d'ailleurs plus ou moins bien. La raison, de mon point de vue, tient au fait que les velleités idéologiques autour du désengagement de l'état ne permettent pas de rémunérer correctement ces nouveaux emplois. Les compétences en patissent. Les visions idéologiques peuvent aussi être un frein sur l'objectif qui doit être celui de l'optimum en terme d'apports de connaissances.

Deuxième remarque : les initiatives autour du logiciel libre font florès. Il faut simplement diffuser de l'information autour du bouillon de "culture" que constituent toutes ces initiatives qui s'inscrivent dans l'espace non marchand. Le marché ne peut pas tout, surtout en matière d'éducation. Je vous renvoie aux théories de Maurice Allais sur la justification libérale de l'intervention de l'Etat que vous devez connaître.

JP Corniou

Merci de votre commentaire... L'externalisation est,là encore, un moyen, comme je le dis ici régulièrement. Mes propres observations me conduisent à penser que le parc du ministère de l'éducation nationale et des collectivités locales est rapidement désuet, mal entretenu et inadapté aux besoins. Comme je suis convaincu par ailleurs qu'il faut se concentrer sur le contenu, le choix optimal serait de confier à des prestataires installation et maintenance - et les volumes permettraient des tarifs intéressants - et de consacrer les ressources rares et qualitatives des enseignants et du personnel de support à de missions pédagogiques. C'est un problème d'allocation des ressources rares qui n'est pas idéologique, mais pratique.

Denis Szalkowski

Comme vous le savez, il n'y a pas d'idées sans idéologie. que vous le vouliez ou non, votre discours s'inscrit aussi dans une idéologie... dominante.

JP Corniou

Ma proposition d'externaliser l'entretien du parc informatique destiné aux écoles - financé par les collectivités locales - suscite toujours de l'agacement de la part des habituels tenants du canal historique qui continuent à penser qu'en informatique il faut tout faire soi-même. Or l'expérience démontre qu'un ordinateur obsolète ou en panne n'apporte rien sur le plan pédagogique et que les enseignants lassés de se battre pour avoir du matériel décent renoncent à l'utiliser. Or c'est l'usage seul qui compte ! Dès lors il faut trouver le moyen efficace d'entretenir le parc au moindre coût. Le faire faire à des entreprises spécialisées, grandes ou petites, régionales ou internationales, me paraît être la seule solution sérieuse car les collectivités n'auront jamais les moyens en personnel pour exécuter cette misson de façon efficace.

Jean

D'accord aussi avec vous sur le constat.
Il y a même de gros mensonges qui sont proférés par le Ministre de l'Industrie qui déclare que le taux d'équipement des écoles en France est correct ...???

Cela dit, Je vous vois venir ...
avec vos gros sabots.

Je suis issu de l'école du temps des MO5 et TO7 et j'en ai fait mon métier . Je gagne bien ma vie autour de ... Linux et du logiciel Libre.

Sur la cartographie des pays interressés par le projet , un portable par enfant à 100 €:
http://www.laptop.org/index.fr.html

La France est marquée en jaune car notre Ministère de l'éducation nationale déclare par le biais de son conseillé NTIC ,Benoît Sillard, que ces machines ne sont pas assez évoluées pour nos écoliers ...
En voulant vendre ou faire vendre des PC MICROSOFT , vous contribuez à l'abêtissement de nos enfants . L'informatique est simple à comprendre sous réserve que l'on commence par les bases , un minimum d'electronique , un système d'exploitation simple et ouvert et quelques logiciels applicatifs génériques pour l'exemple. Apprendre à Cliquer sur une interface graphique ne donnera pas plus de connaissance s à nos chères têtes blondes n'en déplaise à vos amis ...

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